Société

L'économie de l'espoir

L’« espoir » : ce n’est pas le mot le plus long de notre langue, mais son sens est profond. C’est la force motrice qui guide l’humanité vers un avenir meilleur, positif. La base sur laquelle s’appuient nos rêves. Tout le monde doit avoir un but, quiconque veut donner sens à la vie a besoin d’une forme d’espoir.

L’espoir de chaque individu est intrinsèquement lié à la conviction qu’il peut changer les choses au cours de sa vie, qu’il peut avoir un impact positif sur le monde. Car une chose est sûre : l’homme cherche à évoluer, pas uniquement à survivre. Même si les effets n’en sont pas toujours immédiatement visibles, chacun finit par apporter sa pierre à l’édifice. Ce qui conduit, au niveau macro, à la stabilité et à la prévisibilité, mais aussi à la croissance, au bien-être et à la prospérité.

L’espoir en temps de crise

Mais que faire si l’impensable se produit ? Comment réagir face à un avenir incertain et à une prévisibilité qui s’émousse ? Quels sont les effets d’une crise, mineure ou majeure, sur l’espoir des employés ? Quel impact exerce-t-elle sur eux ?

Dans le pire des cas, une crise nous prive de tout sentiment d’espoir : le pessimisme et la méfiance prédominent, accablants. L’absence de certitude et de perspectives à long terme peut être le point de départ d’une spirale négative descendante. Heureusement, l’histoire nous enseigne que l’espoir est profondément ancré dans l’humanité : il ne se balaie pas d’un revers de la main. Les bombardements massifs de civils durant la Seconde Guerre mondiale en sont un exemple frappant. L’objectif de ces actes impitoyables était de miner le moral des citoyens pour qu’ils perdent leurs espoirs et leur combativité. Nombre de bâtiments furent soufflés, il y eut d’innombrables victimes, mais l’espoir demeura — des deux côtés de la ligne de front. Les bombardements trouvèrent rapidement leur place dans la réalité du quotidien.

Mais en temps de crise, l’espoir en prend évidemment un coup. Un sentiment oppressant d’impuissance et de perte de contrôle sur la situation peut dominer. Il devient alors nécessaire, plus que jamais, qu’un leadership solide se mette en place pour montrer la voie et maintenir l’espoir.

Les crises apportent aussi leur lot de bonnes surprises. Dans l’adversité, on trouve un but et un sens à sa vie. Les communautés se retrouvent pour formuler une réponse commune. Les jeunes générations se mobilisent et donnent aux anciens un sentiment d’espoir face à l’avenir. Les entreprises prennent leurs responsabilités et redoublent d’efforts en exploitant leurs connaissances et leur force économique pour aider la société à sortir de la crise. On trouve des solutions à des problèmes structurels anciens. Que l’on songe aux réformes de la justice et de la police après les atrocités commises par Marc Dutroux.

Les dirigeants (d’entreprise) doivent créer de l’espoir pour les autres

Dès que l’espoir s’estompe, le besoin de leadership augmente. Ce leadership peut venir de tous les pans de la société. Très souvent, les crises font émerger de nouveaux « héros » qui prennent les devants et deviennent une source d’inspiration et de motivation pour les autres. Mais comment se présente ce leadership ? Prenons l’exemple des entreprises. Quel est le rôle des chefs d’entreprise en cas de tempête ? Que doivent faire les patrons lorsque l’espoir est en jeu ? L’espoir est notre dernière ligne de défense : mieux vaut donc qu’elle soit bien gérée.

1. Une culture de l’engagement

Avant toute chose, un engagement sincère et fort est fondamental. Auprès des parties prenantes aussi bien internes qu’externes. Un engagement qui va au-delà de phrases telles que « nous sommes fiers de vos réalisations » ou « nous comprenons cette situation délicate ». Cet engagement doit être un élément naturel de la culture d’entreprise — on ne le sort pas de son chapeau lorsqu’une crise éclate. C’est justement en temps de crise que cet engagement établi de longue date permet à l’entreprise de résister. Efforcez-vous donc d’associer vos parties prenantes non seulement aux décisions quotidiennes, mais aussi aux projets à plus long terme. Créez un sens commun en soulignant sa pertinence sociale.

Pour mettre en place une culture de l’engagement, une série de conditions préalables doivent être réunies. Il faut tout d’abord faire tomber les lourdes barrières hiérarchiques susceptibles d’entraver l’ouverture et la transparence de la communication. Les employés doivent avoir la possibilité d’exprimer leurs préoccupations et le sentiment qu’elles sont prises en compte. Ensuite, il est important que les employés bénéficient de la flexibilité et de la confiance nécessaires pour accomplir leur travail le mieux possible. Mais aussi de la possibilité de faire des erreurs et de se développer. Ils ont enfin besoin d’être soutenus comme il se doit, surtout lorsqu’ils éprouvent des difficultés d’ordre personnel. Pensons à l’accompagnement en cas de burn-out ou de reprise du travail après une période prolongée.

2. Continuer à regarder vers l’avenir

Lorsque l’espoir est en jeu, on attend également des dirigeants qu’ils restent tournés vers l’avenir, qu’ils expliquent les étapes suivantes et permettent à chacun de contribuer à formuler des solutions. Il s’agit de susciter l’enthousiasme, d’ouvrir la voie à un avenir positif pour contrer la spirale négative que nous avons évoquée. Pour y parvenir, il faut stimuler l’ouverture d’esprit et l’envie d’apprendre à tous les niveaux de l’entreprise. L’audace des employés s’en trouvera renforcée : ils oseront remettre les choses en question. De quoi apporter de l’énergie, de l’oxygène, et permettre de rêver à tout ce qui peut encore arriver…

3. Des dirigeants visibles

Dans les situations de crise, les dirigeants doivent tenir la barre. Ils doivent rester visibles et accessibles, même lorsqu’ils ont les mains dans le cambouis. Par ailleurs, la transparence de la communication est cruciale et les dirigeants doivent avoir le courage de se montrer vulnérables : même eux n’ont pas réponse à tout, tout de suite. Dans de tels moments, il est important de montrer que l’on cherche une solution ensemble. Les dirigeants doivent être un modèle d’espoir, de confiance, de solidarité.

Conclusion

Il y aura toujours des moments où l’on risque de perdre le contrôle et où l’on doit compter sur les autres, ceux qui peuvent faire une différence positive. Mais l’« espoir » n’est pas une stratégie isolée. Il ne s’agit pas d’un remède miracle pour que les employés se sentent mieux à court terme. Non : c’est plutôt un corollaire de la différence positive que l’on crée pour ceux en qui l’on a confiance. Face à une crise, mais aussi au quotidien. Il est de notre devoir moral de transformer le découragement en espérance.

Car l’espoir nous apporte davantage que nos craintes les plus profondes.

Bart De Smet