Opinion

Made in Belgium

Pourquoi David l'a-t-il emporté face à Goliath ? Pas parce qu'il était le plus grand, mais parce qu'il a compris qu'il devait suivre une autre tactique. Un petit pays comme la Belgique peut être plus fort sur le plan économique s'il adopte la stratégie de David. Les outsiders l'emportent bien plus souvent qu'on ne le pense, essentiellement en tentant une autre approche.

Plus personne ne met en doute la nécessité de suivre une autre voie. Les exemples ne manquent pas, il est temps d'adopter un autre mode de pensée, une autre façon de faire des affaires. Mais comment? Le 29 octobre dernier, Stijn Meuris abordait déjà le sujet dans le quotidien De Morgen : «S'appuyer sur une poignée de grandes entreprises dans une seule région n'est pas particulièrement judicieux sur le plan socio-économique, et certainement pas à l'heure actuelle. En fin de compte, nous devons aller de l'avant. Parce que reculer n'est pas une option et que faire du sur place est un cauchemar.»

En nous concentrant encore plus sur les entreprises locales (comprenez des entreprises qui ont leur centre de décision en Belgique), nous augmentons notre pouvoir et élargissons nos perspectives d'avenir pour ce pays. En investissant localement, nous alimentons notre économie avec des impôts et des cotisations sociales, nous finançons une part importante de la dette publique, nous veillons à une meilleure infrastructure et nous stimulons la croissance et le développement. Évidemment, nous ne songeons pas seulement aux investissements dans de grandes entreprises belges cotées en Bourse, mais bien à un avenir fait de beaucoup de petites, moyennes et grandes entreprises dirigées par des gens d'ici.

En continuant à investir dans des formations de haute qualité, nous formons des travailleurs compétents, capables de faire grandir nos entreprises locales dans les secteurs de l'industrie et des services, voire d'en faire des entreprises dont le succès se mesure à l'échelle mondiale. En cas d'expansion internationale, il est possible d'exploiter l'expérience et les connaissances linguistiques de ce personnel qualifié dans des succursales implantées à l'étranger. L'emploi dans nos entreprises du BEL20 continue à se développer, ce qui se traduit aussi par des postes supplémentaires chez leurs sous-traitants. Un phénomène que nous perdons parfois de vue.

Dans le secteur des services, nous pouvons en outre développer des compétences qui ne sont pas « facilement déplaçables ».  Ainsi, par exemple, les besoins d'un client en termes d'assurances varient d'un pays à l'autre. Ageas est présent dans 12 pays, en Europe et en Asie. Partout, le groupe fait appel au savoir-faire et à des contacts locaux afin de pouvoir mieux répondre aux habitudes de chaque marché spécifique. Notre réseau de distribution varie d'un pays à l'autre pour améliorer davantage l'orientation de nos ventes. La langue utilisée et même la marque sont adaptées au marché local. Dans le secteur des services, si certaines tâches pourraient être sous-traitées (comme l'informatique ou la comptabilité), cela ne vaut souvent pas la proximité avec le client et le fait de pouvoir réagir très rapidement. Bien entendu, cette approche peut être appliquée à d'autres secteurs, comme celui des soins aux personnes âgées. En raison du vieillissement de la population, la demande de travailleurs ne fera qu'augmenter et ne se limitera plus uniquement aux profils hautement qualifiés.  

Chaque travailleur, entreprise, secteur et économie se trouve face au même problème : rien n'est jamais acquis pour toujours. Ageas en est un bel exemple. Notre groupe d'assurances a vu le jour voilà 188 ans (avant même la création de la Belgique) en tant que compagnie d'assurances appelée « AG ». Au fil des ans, tant son activité centrale que son périmètre d'action ont subi une réelle métamorphose. En 2008, nous avons navigué en eaux particulièrement troubles. Il nous a fallu penser et agir différemment pour renaître de nos cendres et parvenir à notre position actuelle : celle d'unique groupe d'assurances à figurer au BEL20, avec un centre de décision en Belgique, plus de 13 000 collaborateurs à travers le monde et 15 000 de plus par le biais de partenariats locaux.

Pour résumer, miser davantage sur nos propres entreprises belges (petites, moyennes et grandes) doit aboutir à ce que des décisions stratégiques concernant l'économie belge soient également prises en Belgique. N'oublions pas que la Belgique a aussi son mot à dire.
 

Bart De Smet, CEO d'Ageas